David Dufour est Chargé d’affaires chez Forétude Ingénierie, bureau d’étude localisé dans le Nord spécialisé dans le forage dirigé, particulièrement dans le franchissement des voies SNCF.

Par ailleurs responsable de l’atelier Travaux neufs au sein de la FSTT, nous avons recueilli son témoignage lors de la diffusion de notre enquête annuelle du marché du Sans Tranchée.

Votre commentaire à chaud sur les résultats de l’enquête, sur le volet des travaux neufs ?

David Dufour - Forétude Ingénierie - témoignage technique sans tranchée

Je ne suis pas surpris que le forage dirigé occupe une si large place, car c’est une technique sans tranchée qui cumule les avantages. Outre tous les bénéfices d’un chantier sans tranchée, et donc sans déblai ni gène auprès des riverains, c’est une technique avec laquelle on gagne du temps et de l’argent grâce à sa simplicité de mise en œuvre. A titre d’illustration, un forage dirigé ne nécessite de creuser qu’une niche de 2 à 3m3 de chaque côté du chantier, alors qu’un micro-tunnelier nécessitera 2 à 3 semaines de travail rien que pour créer un puit. C’est autant de temps et d’argent économisé !

Le forage dirigé est une méthode qui arrive à maturité, tant sur la préparation des chantiers que sur leur réalisation. On est désormais très loin des balbutiements des débuts, notamment dans les petits forages !

Comment s’articule le marché et les acteurs du forage dirigé ?

Nous ne sommes finalement qu’une poignée d’acteurs en France, on se compte presque sur les doigts de deux mains. On pourrait néanmoins faire une distinction entre 2 grands types de forages dirigés, qui scindent le marché en deux :

  • Les “petits” ouvrages de moins de 400 ou 500m, qu’on pourrait appeler les forages de distribution, sont ceux qui comptent le plus d’entreprises.
  • Viennent ensuite les ouvrages plus longs, qui vont généralement de pair avec un élargissement du diamètre.

On dénombre encore moins d’acteurs dans cette seconde catégorie car les exigences de conception et de préparation ne sont pas du tout les mêmes, et cela dès l’écriture de la réponse à un appel d’offres.

A quelle typologie de clients avez-vous à faire ?

A vrai dire, nous restons toujours globalement sur la même maîtrise d’ouvrage : nos clients sont principalement des gros faiseurs, à l’image de Enedis et GRDF, même si le déploiement de la fibre optique nous fait aussi travailler un peu plus sur les réseaux télécom en ce moment.

Comme l’atteste le résultat de l’enquête FSTT 2020, l’électricité compte le plus grand métrage linéaire posé. Trois raisons expliquent que ce réseau domine nos chantiers.

  1. D’une part parce que l’électricité est « partout », contrairement à la fibre par exemple, en cours de déploiement, ou au gaz qui ne concerne pas nécessairement tout le monde.
  2. Mais si Enedis est le plus gros donneur d’ordre des entreprises du sans tranchée, c’est aussi parce que l’entreprise dispose d’une culture du forage dirigé depuis très longtemps : le 1er marché cadre date déjà de 15 à 20 ans environ ! Cette technique sans tranchée leur facilite clairement la vie, les riverains et commerçants ne sont pas pénalisés et eux-mêmes gagnent du temps en évitant les balisages de déviation ou autres contraintes d’un chantier ouvert.
  3. Enfin, la dernière explication est économique : le volume pratiqué leur permet d’obtenir des prix intéressants au mètre linéaire, ce qui diminue le delta tarifaire avec des travaux ouverts.
FSTT - Marché 2019 du sans tranchée en France - Les types de réseaux posés

Pourquoi le forage dirigé a-t-il du mal à toucher d’autres types de maîtres d’ouvrage ?

C’est vrai qu’il nous est particulièrement difficile d’aller vers des syndicats des eaux par exemple. On compte bien sûr quelques clients dans notre portefeuille, mais les toucher davantage s’avère plus difficile car beaucoup ne connaissent pas du tout le forage dirigé ni toutes autres techniques sans tranchées.

N’en ayant pas la culture, il nous est plus difficile de les convaincre, d’autant que, disons-le franchement, certains sont très fermés. C’est une réaction très humaine puisqu’on a tous tendance à rester dans notre zone de confort. Naviguer en eaux inconnues n’est jamais très confortable, d’autant que ça donne à ces maîtres d’ouvrage moins d’emprise sur leurs sous-traitants : ils ont l’impression de moins maîtriser l’évolution du chantier puisqu’ils ne connaissent pas les techniques.

Par confort ou par manque d’information, beaucoup restent donc dans les techniques « traditionnelles » qu’ils connaissent.

Est-ce que l’aspect environnemental est un élément que vous mettez en avant lorsque vous évoquez les techniques sans tranchée que vous mettez en œuvre ?

Si l’on entend « environnemental » au sens moderne du terme, à savoir notamment la prise en compte des tierces parties, alors oui c’est très clairement vendeur d’indiquer d’énormes gains en termes de bruit et de perturbations diverses pour les riverains. C’est très facile à expliquer et à démontrer les bénéfices d’un chantier réalisé sans tranchée !

Comment se porte le marché du travail dans le petit monde du forage dirigé ?

Je suis fier d’être dans un groupe qui grandit, nous avons donc clairement des besoins. Mais le secteur du forage dirigé reste tout de même un microcosme assez confidentiel, y compris d’ailleurs en termes de formation : c’est surtout sur le tas et en interne que les jeunes sont formés.

Consultez l’enquête sur le Marché du Sans Tranchée en France